Déconseillées par l'UCI, les cétones seraient sans effet sur les performances

Utilisées par certaines équipes depuis plusieurs années, les cétones sont dans le viseur de l'UCI, qui déconseille leur utilisation. Selon le directeur médical de la fédération, aucune étude permet d'affirmer que cette substance a un effet sur les performances.

C’est un nom qui est sur toutes les lèvres dans le peloton cycliste professionnel. Depuis un peu plus de deux ans, plusieurs équipes utilisent des produits à base de cétones comme un complément alimentaire. Or, en septembre dernier, l’Union Cycliste Internationale (UCI) a émis la recommandation de renoncer à leur utilisation, malgré le fait que cette substance ne soit pas officiellement reconnue comme dopante par l’Agence Mondiale Antidopage (AMA). Dans un entretien accordé au quotidien L’Equipe, le Professeur Xavier Bigard, directeur médical de l’UCI a affirmé qu’« à ce jour, il n'existe aucune preuve scientifique démontrant que les corps cétoniques améliorent les performances », se basant sur les conclusions d’études récentes. « Une autre de ces études a même démontré une détérioration dans certains conditions », ajoute-t-il. Pour ce qui est de la recommandation émise par l’UCI, elle est liée au fait que « ces corps cétoniques provoquaient des troubles digestifs ».

Trop peu d’informations pour interdire les cétones


Sans mettre en avant des effets secondaires graves, le Professeur Xavier Bigard assure que les cétones « peuvent expliquer une altération des performances à cause de pesanteurs digestives, de nausées, parfois de vomissements ou d'accélération du transit ». « A partir du moment où il y a cette potentialité d'effets secondaires et qu'il n'y a pas d'amélioration des performances, je ne vois pas pourquoi on en recommanderait l’usage, a-t-il ajouté. On a donc émis un avis de non-recommandation. » Quant à une éventuelle interdiction, comme récemment demandée par Romain Bardet, le directeur médical de l’UCI admet qu’il ne sera pas simple de la justifier « en l'état actuel de nos connaissances ». Toutefois, une étude scientifique sera prochainement lancée par l’UCI, notamment concernant la posologie et le type de substance. « Il y a peut-être une catégorie qui n'a pas été suffisamment étudiée et on va s'y intéresser », ajoute le Professeur Xavier Bigard. Une étude qui, toutefois, ne concernera pas le risque sanitaire lié aux cétones par manque d’« années de recul de consommation ». Enfin, pour justifier leur utilisation, le directeur médical de l’UCI n’écarte pas la thèse de… l’effet placebo.

  

Dopage, Bardet en remet une couche

Romain Bardet a une nouvelle fois exposé son inquiétude concernant la lutte antidopage. Dans son viseur, le manque de contrôle, et l'absence de décision en ce qui concerne les cétones.

« J’ai l’impression d’avoir élevé mon niveau de jeu cette année mais ça ne s’est pas forcément vu, tant le peloton roule vite… Ça va crescendo chaque année et ce n’est sans doute pas près de s’arrêter. » A l’image d’Arnaud Démare, Romain Bardet fait le constat que le niveau s’est grandement élevé en cyclisme sur les derniers mois. L’Auvergnat avait déjà illustré ce sentiment en évoquant une course de MotoGP lors des arrivées en altitude, ce qui avait beaucoup fait réagir. Et si Bardet refuse d’exposer ses doutes sur ses concurrents, il s’agace à nouveau des manques affichés par les instances de lutte contre le dopage.

Trop peu de contrôles

Comme il l’avait déjà fait par le passé, Bardet regrette le peu de contrôles antidopage qu’il a subis cette saison. « Ça ne m’avait pas étonné en 2020 avec le Covid qui avait tout chamboulé, mais là… Je n’ai pas l’omnipotence pour affirmer que c’est une tendance générale, peut-être qu’il y a des exceptions et je suis sûr que ces gens font bien leur travail en ciblant les coureurs qu’ils contrôlent, mais quand je vois qu’on est parfois quatre ou cinq équipes à loger dans le même hôtel pendant certains stages sans qu’on n’y soit jamais testés sur de longues périodes, je me dis qu’il y a encore du travail à faire. Même si l’équipe DSM a son propre programme antidopage, qui fait qu’on subit des contrôles réguliers, on devrait être testés encore davantage selon moi, c’est indispensable pour assurer la propreté de notre sport », confie-t-il dans L’Equipe.

Le flou sur les cétones

L’autre sujet qui agace Bardet, c’est le flou autour des cétones, ce mystérieux produit qui coûte très cher, et qui n’est utilisé que par certaines équipes, comme la Jumbo-Visma de Roglic et Van Aert, ou la Quick-Step de Julian Alaphilippe. Dans sa dernière étude, l’UCI a estimé que les cétones n’avaient pas d’effet dopant, ce qui surprend le coureur français. « Les cétones, on en parle depuis des années, regrette Bardet. Pourquoi n’a-t-on toujours pas de position claire à ce sujet ? Pourquoi leur consommation dépend-elle encore du bon vouloir des équipes, de leurs critères éthiques ou de leurs capacités financières ? (…) Je suis juste navré de voir qu’on demeure dans une zone de flou. Il serait si simple de prendre une décision ferme, la même pour tout le monde. Combien d’articles, combien de polémiques faudra-t-il encore avant qu’on légifère ? Les décisions sont prises trop lentement et cela renforce un cyclisme à deux vitesses. »