Que faisait Julian Alaphilippe dans les Flandres cette semaine ? Le double champion du monde a participé à une reconnaissance du Tour des Flandres, agitant la sphère cycliste qui souhaite toujours sa participation à une grande course. "Alaf" n'en sera pas. Quand le "Ronde" s'élancera, lui aura déjà pris la direction du Pays basque pour le tour éponyme qui débute lundi. Reste à savoir s'il entamera la dernière ligne droite de sa préparation pour Liège-Bastogne-Liège avec une immense pression sur les épaules. Tout autre résultat qu'un succès de Quick-Step dimanche en serait le synonyme. Le "Wolfpack" étant anormalement sevré de succès sur les grandes courses en 2022.
L'été dernier, quand Patrick Lefevere avait eu besoin de recadrer un Mark Cavendish qui demandait trop d'argent pour prolonger, il avait employé l'argument suivant : aucun sponsor dans les Flandres ne paierait plus pour que Cavendish reste dans l'équipe. "Son image là-bas est différente de celle qu'il a à Londres", avait-il précisé. Par cette pirouette, le manitou belge voulait faire baisser la note. Par cette pirouette, il rappelait que le cœur de son affaire se trouvait en Belgique, dans ces Flandres que le "Ronde" va visiter dans tous les sens dimanche.
UN SUCCÈS DE JAKOBSEN... ET C'EST TOUT
Depuis plusieurs saisons, le "Wolfpack" a pris l'habitude de briller partout dans le monde mais le faire entre la fin février et la fin avril a plus une saveur particulière, une importance capitale. Problème, la campagne flandrienne des hommes de Lefévère est jusqu'ici médiocre pour rester poli. En remportant Kuurne-Bruxelles-Kuurne, fin février, Fabio Jakobsen pensait lancer la meute mais celle-ci s'est perdue en chemin, ridiculisée tour à tour par les Jumbo-Visma et Mathieu van der Poel et même rarement dans le jeu pour la victoire, là où elle étouffait la course par son surnombre dans le passé.
Dans la flandre cycliste, une semaine écrase toutes les autres de son cachet, celle que l'on appelle "sainte" et qui s'étire du Grand Prix E3 au Tour des Flandres en passant par Gand-Wevelgem et À Travers la Flandre. Ajoutez-y le Het Nieuwsblad, qui lance la saison belge et vous obtenez le quintet des courses les plus prestigieuses de ce côté-là du plat pays. Avant le pinacle de cette semaine qui aura lieu dimanche, la Quick-Step compte pour meilleur résultat une 9e place, celle de Florian Sénéchal sur le Het Nieuwsblad.
Tenant du titre sur le Tour des Flandres, Kasper Asgreen a lui terminé 10e de l'E3 mais à plus d'une minute trente du duo Van Aert-Laporte. Le Danois ne s'était d'ailleurs pas battu pour un podium, preuve que pour le Wolfpack, seule la victoire vaut sur ces courses. Preuve aussi qu'il n'avait pas le coeur à ça et que la démonstration des Jumbo-Visma lui avait mis un coup sur la tête. Car entre les équipes belge et néerlandaise, le rapport de force s'est largement inversé.
ASGREEN AUX ABONNÉS ABSENTS
Autrefois, les hommes de Patrick Lefevere faisaient la pluie et le beau temps dans les Flandres. La force du nombre permettait à de nombreux coureurs de s'imposer. On citera Lampaert, Stybar, Terpstra, Gilbert ou Asgreen pour les dernières années seulement. Le raté du Het Nieuwsblad 2015 quand Stannard avait fait la nique à trois Quick-Step dans le final était certes embarrassant mais il disait beaucoup de la force collective de l'équipe. Celle affichée par les Jumbo, cette équipe qui, même sans Wout Van Aert incertain, pourrait peser sur la course dimanche avec Laporte ou Benoot.
On cherche à l'inverse qui parmi les coéquipiers de Julian Alaphilippe, absent donc, pourrait se défaire du marquage des favoris, qu'ils s'appellent Van Aert, van der Poel ou Pogacar. Avec Asgreen, Lampaert, Sénéchal ou Stybar, elle compte pourtant des armes. Mais hier enfiler le maillot de l'équipe héritière de la Mapei semblait suffire pour briller sur le Ronde. Dimanche, il en faudra plus. Un miracle, peut-être.